Profession

 

Sommaire.

I. Invariabilité du dépôt de la foi.

II.  Apostolicité de notre sainte religion.

III. Pratique liturgique traditionnelle & discipline sacramentelle ancienne.

IV. Ministère sacerdotal dans son antique extension.

V. Société ecclésiastique.

VI. Spiritualité augustinienne.

VII. Nullam partem.

VIII. L’Eglise est dans l’Evêque.

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I. Invariabilité du dépôt de la foi.

Rejet des nouveautés.

 

La Concorde Augustinienne et Sacerdotale a pour objet la pratique de la vie chrétienne, conforme à la Tradition, la Parole de Dieu et les Saints Canons. Elle n’entend pas être une réaction, ni en réaction, vis-à-vis de certains faits qui caractérisent l’époque moderne. La Concorde ne se définit ni comme une réponse, ni comme une solution au problème posé par le néo-catholicisme de l’Eglise issue des réformes qui débutèrent grosso modo en 1962.

Rejetant toute nouveauté, toute variation dans la foi et les mœurs, elle entend simplement correspondre à la nature de l’Eglise de N.-S. Jésus-Christ, telle qu’elle existe depuis que le Messie a inauguré la Nouvelle Alliance par le Sacrifice expiatoire du Calvaire. Elle professe l’ancienne religion catholique romaine, telle que nos Pères l’ont reçue des SS. Apôtres, et telle qu’elle s’est maintenue, jusqu’à ce que les Novateurs introduisent en son sein des innovations et des erreurs qui, progressivement, amenèrent à la prédication d’un « autre Evangile » que celui qui avait été prêché in principio.

 

Conformément à la formule de Sᵗ Vincent de Lérins, dans son Commonitorium, elle croit et professe sans arrière-pensée qu’ « en l’Eglise catholique, on doit avoir grand soin de s’en tenir à ce qui a été cru dans tous les lieux, dans tous les temps et par tous les fidèles. … Nous serons catholiques, si nous suivons l’universalité, l’antiquité, le consentement. »

 

II. Apostolicité de notre sainte Religion.

La religion catholique ne commence pas au XIXᵉ siècle.

 

Cette profession de foi catholique, qui embrasse tout ce que le Magistère, tant conciliaire que papal, enseigne et impose aux croyants, motive la Concorde augustinienne et sacerdotale à affirmer hautement que la religion chrétienne n’a pas commencé d’exister au XIXème siècle. Il est, hélas !, une opinion fort répandue, qui consiste à s’imaginer que la religion catholique était dans un état d’imperfection avant la proclamation du dogme de l’Immaculée Conception et celui de l’infaillibilité pontificale. Or, si l’on note que ces notions ont toujours appartenu de facto à la croyance générale de l’Eglise, ce qui exclut que l’on considère les anciens catholiques comme des ignorants, voire des mécréants –, en revanche, c’est l’interprétation que nombre de catholiques en ont fait, qui pose problème. En effet, le XIXème siècle vit l’introduction dans la forma mentis catholique de la notion de progrès, triomphalement brandie par les ultramontains qui voyaient dans le triomphe – illusoire – de la papauté un signe avant-coureur de la victoire définitive de l’Eglise, non seulement sur le monde impie, mais surtout sur le christianisme apostolique, dont les maximes avaient régné jusque-là. Au XIXème siècle, le visage – sinon la substance – du catholicisme a radicalement changé. La rigueur des commandements de l’Evangile, le fonctionnement hiérarchique de l’Eglise et l’ordonnation traditionnelle de la Cité ont fait place à un système qui annonçait déjà l’ouverture au monde et le grand racolage d’une religion éprise de nouveauté. Le molinisme s’imposa presqu’universellement comme la meilleure façon de ne pas effaroucher le mondain ; le laxisme dans la morale, comme celui de ne pas s’aliéner les mécréants ; et, par-dessus tout, l’invention du laïcat par Veuillot et son école fit émerger une catégorie de « fidèles » décidés à prendre leur revanche sur dix-huit siècles « d’oppression cléricale » !

 

L’impuissance et la stérilité du traditionalisme tiennent à ce que, loin de consister dans la fidélité à « l’Eglise de toujours », il n’est que le promoteur des nouveautés du XIXème siècle, des innovations de ceux qui, non sans ironie, s’affichèrent comme les ennemis jurés des « Lumières », de la Révolution et du libéralisme – et qui en furent en réalité les adaptateurs les plus éhontés.

 

Dans le jugement des Evêques du XIXème siècle, dont l’autorité et la probité ne furent jamais plus attaquées, contestées et battues en brèche que par les militants dits ultra-catholiques, les principes de ces derniers étaient subversifs non seulement de la hiérarchie ecclésiale, mais encore de l’ordre social en tant que tel. En effet, le laïc qui s’imagine être le défenseur de l’Eglise se comporte comme si son état le plaçait en-dehors de la hiérarchie qui structure le Corps mystique du Christ.

 

Aux principes appliqués de la société catholique traditionnelle telle qu’elle fut réellement – et telle que les Princes spirituels et temporels en étaient les garants –, les novateurs du XIXème siècle opposèrent un projet de société nouvelle, fondée sur une Eglise recomposée, fondée sur la conception d’un Pape à la puissance illimitée, épaulé par les laïcs militants, dont le clergé n’était plus que l’auxiliaire, tandis que la notion même d’épiscopat était contestée, disputée et réduite à néant.

 

Depuis, les fidèles de la religion catholique n’ont jamais été que les avant-coureurs – les escoutes ! – de la société moderne, au point qu’il n’y ait pratiquement aucune aberration contemporaine qui ne trouve, d’une manière ou d’une autre, son origine lointaine dans les écrits des plus sérieux auteurs du XXème siècle  qui s’inscrivirent dans ce mouvement de refondation intégrale de la religion… Egalitarisme, féminisme, gender, etc., tout cela est la conséquence du mépris pour les « anciens sentiers » (Jér. VI, 16), les « bornes posées par nos Pères » (Prov. XXII, 28).

 

« Deux amours ont bâti deux cités : l’un, égoïste et impur, a fait la cité de la terre ; l’autre, social et sacré, la cité du ciel », affirme N. S. P. Augustin (De Genesi ad litteram, IX, 20) La Concorde augustinienne et sacerdotale envisage donc le ministère sacerdotal comme l’office de pontifex, de lien entre Dieu et les hommes, et plus précisément son peuple (les domesticos fidei, Gal. VI, 10). Ce dernier n’est pas une entité cybernétique ou volontariste, mais bien une société de baptisés vivant dans les conditions de la sociabilité normale.

 

 

III. Pratique liturgique traditionnelle
& discipline sacramentelle ancienne

Retour aux anciens sentiers dont parle le Prophète Jérémie.

 

La Concorde Augustinienne et Sacerdotale ne propose donc pas des « centres de messe » où les fidèles viendraient «prendre les sacrements» en se bouchant qui le nez, qui les yeux, qui les oreilles. L’Eglise n’est pas une auberge espagnole; elle est encore moins un supermarché spirituel, où chacun viendrait s’emparer des marchandises dont il a besoin pour se concocter la religion catholicoïde de son cru. La Concorde Augustinienne et Sacerdotale professe hautement que le Prêtre est le ministre des sacrements, et qu’à ce titre, fondé sur les enseignements apostoliques et les canons des Conciles, il est le seul juge en ce qui concerne la dispensation des Sacrés Mystères. Ni le baptême ni la sainte communion ne sont des droits; la réception de l’absolution l’est encore moins, sauf à penser que le Prêtre est un distributeur gratuit de sacrements, et que le caractère qu’il a reçu fait de lui l’esclave de ceux qui, par ailleurs, se passent fort bien de lui.

 

Les Prêtres de la Concorde Augustinienne et Sacerdotale savent que l’abus des sacrements est la cause qu’il y a « parmi nous beaucoup de gens débiles et de malades, et qu’un grand nombre sont morts » (ICor. XI,30). Aussi pratiquent-ils les prescriptions de Sᵗ Charles Borromée aux Confesseurs, veillant à ce que les maximes de l’Evangiles, et non de la mondanité à vernis catholique, soient mis en œuvre, autant que la faiblesse humaine le permet. Le primat de la charité, c’est-à-dire de l’amour de Dieu, s’impose aux Prêtres, tant pour eux-mêmes que pour ceux qui leur sont confiés par la Providence.

 

Afin de correspondre le plus exactement possible aux exigences de notre sainte Religion, les Prêtres de la Concorde Augustinienne et Sacerdotale veillent à ce que les sexes soient séparés dans l’Eglise, conformément à la recommandation du Code de Droit Canon (Can.1262,1), que les vêtements soient modestes en tout temps, et les femmes voilées au moins à la messe.

 

Notre communauté n’estime ni utile ni souhaitable d’accroître indéfiniment sa surface visible sur Internet et les différentes plateformes numériques, relevant bien davantage de ce que S. Jean désigne par «l’orgueil de la vie.»

En revanche, reprenant à notre compte les paroles divines du Maître, à ceux qui voudraient connaître la religion catholique et l’usage ordonné des moyens de salut que l’Eglise fournira jusqu’à la fin des temps, nous disons: « Venez et vous verrez » (S. Jn I, 39).

 

Ajoutons que les Prêtres de la Concorde Augustinienne et Sacerdotale célèbrent la messe de S. Pie V, disent, faute de mieux, le Bréviaire tel que promulgué sous S. Pie X par la Constitution Apostolique Divino afflatu. De plus, les réformes amorcées sous Pie XII n’étant que l’avenue qui débouche sur l’altération de la Messe et de tous les Sacrements, les Prêtres de la Concorde s’abstiennent de prendre en compte toutes ces innovations, au premier rang desquelles se trouve la nouvelle Semaine Sainte promulgée en 1955.

 

IV. Ministère sacerdotal dans son antique extension.

Rejet du militantisme.

 

La Concorde augustinienne et sacerdotale professe une sainte horreur envers les officines laïques destinées à « former » les fidèles, de sorte que le ministère sacerdotal se réduit à prodiguer ce que les laïcs ne peuvent absolument pas se procurer à eux-mêmes directement. Elle désapprouve la pratique qui consiste à encourager les lectures tous azimuts, qui produisent en général une indescriptible confusion dans les esprits, et oppose à l’action pastorale une jungle de conceptions pour ainsi dire inextricablement enchevêtrée. En effet, « les lèvres du Prêtre gardent la science, et de sa bouche on demande l’enseignement, car il est l’Ange du Seigneur Sabaoth » (Mal. II, 7).

 

Le rapport du pasteur au troupeau est normé par la charité. Or, la charité ne se trouve que là où règne l’ordre du Dieu dont S. Paul affirme qu’il « n’est pas un Dieu de désordre mais de paix » (I Cor. XIV, 33) ; selon l’adage : pax tranquillitas ordinis, « la paix, c’est la tranquillité de l’ordre ». La Concorde augustinienne et sacerdotale professe que l’on ne trouve, chez les clercs, un véritable amour et dévouement pour les laïcs que dans la mesure où ceux-ci sont ordonnés, c’est-à-dire se trouvent dans l’ordre ecclésial, dont ils font intrinsèquement partie, et dont ils constituent le dernier degré. C’est ainsi, et seulement ainsi, que le christianisme se manifestera réellement, selon la parole de N.-S. Jésus-Christ : « C’est à ceci que tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres » (S. Jn XIII, 35).

 

Deus caritas est (I Jn IV, 7). L’ordre ecclésial est la condition première pour que l’état de grâce existe et porte des fruits à la gloire de notre Père céleste (cf. S. Math. V, 16). La Concorde augustinienne et sacerdotale entend mettre ses clercs à même de remplir les conditions du ministère sacerdotal dans le maximum de son extension, tant spirituelle que temporelle, en dispensant à ses clercs un enseignement approprié, conforme à la Tradition de l’Eglise et de la vision chrétienne du monde. Aux laïcs qui veulent bénéficier de la vie liturgique et sociale, elle recommande de tout mettre en œuvre afin de s’insérer réellement dans l’ordre des choses voulu par Dieu : « Vous qui êtes plus jeunes, soyez soumis aux Anciens » (I Pi. V, 5).

 

V. Société ecclésiastique.

Rejet du contrat social, sous toutes ses formes.

 

Depuis un siècle et demi, la quasi-totalité des entreprises catholiques sont fondées sur le concept de contrat social : tout ce qui a pu se faire, et Dieu sait si cela représente un nombre élevé de tentatives, repose sur l’accord d’individus de même persuasion, déterminés à s’unir pour « faire changer les choses ». Ce vice fondamental a été la raison de l’échec des plus grandes, des plus belles et des plus intelligentes tentatives de s’opposer aux méfaits de la Modernité, comme certains mouvements de retour à la terre du XXème siècle anglo-saxon catholique.

 

De même que l’individu enfant de la colère (Eph. II, 3) est agrégé à l’Eglise par le bain de la régénération (Tite III, 5) sans lequel nul ne saurait être sauvé, sans aucun mérite de sa part, mais par la pure grâce divine (Eph. II, 5), par l’intermédiaire des Prêtres, ou plus précisément des Evêques, ainsi, l’individu moderne est agrégé à la société traditionnelle par l’intermédiaire des légitimes dépositaires du pouvoir temporel. Nul ne s’arroge la citoyenneté de Jérusalem : c’est par un acte d’humilité qu’il devient capable d’y être introduit. La cité catholique, ce n’est pas l’utopie de demain, bâtie par « les hommes de bonne volonté » (selon le contresens devenu commun dans le néo-catholicisme), mais le contexte de vie accessible hic et nunc dès lors que l’on s’insère dans l’ordre des choses tel que le Dieu Créateur et Législateur l’a voulu et instauré.

 

Avec l’aide de Dieu, la Concorde augustinienne et sacerdotale est dans l’affirmation, non la réaction. Le contexte inauguré par la Révolution de 1789, communément appelé la Modernité, est l’inversion de l’ordre social voulu par Dieu. Qu’il soit dû aux menées subversives de tel ou tel groupe ou organisation n’est pas le plus grave ; ce qui, pour la religion catholique, constitue le problème majeur, c’est que la refondation du catholicisme au XIXème siècle n’a été possible que par le truchement des acquis de la Révolution, à savoir : la privation de la hiérarchie ecclésiastique de son autorité effective, la liberté de la presse, la liberté de parole et l’impunité totale des contempteurs des clercs. Sans la Révolution française, le journalisme catholique et les laïcs pontifiants n’auraient jamais pu exister. Par les Veuillot, les Drumont et leurs émules cléricales, c’est l’esprit des « Lumières » qui a pénétré au plus profond de la forma mentis catholique, et qui l’a subvertie mieux qu’aucune menée des ennemis de l’Eglise…

 

VI. Spiritualité augustinienne.

Rejet de l’apparitionnisme.

 

La Concorde augustinienne et sacerdotale reconnaît comme valables toutes les écoles de spiritualité que l’Eglise a autorisée et encouragée. Il n’en reste pas moins que le mélange des genres, l’emploi simultané d’une pluralité de méthodes, et surtout l’éclectisme, conséquences directes de l’accessibilité universelle (par la démocratisation de l’édition) des textes normalement réservés aux Prêtres et à leurs dirigés, produisent comme seuls résultats une confusion spirituelle sans précédent.

 

La Concorde augustinienne et sacerdotale récuse catégoriquement qu’une apparition, fût-elle de la T. S. Vierge, puisse avoir une autorité plus grande que les enseignements de l’Ecriture sainte, des Pères et des Conciles. L’eschatologie catholique ne saurait s’appuyer sur des « prophéties » qui n’ont aucune garantie non seulement d’infaillibilité, mais encore d’authenticité. L’expérience de ces derniers siècles devrait suffire largement pour faire rejeter par tout chrétien craignant Dieu les excentricités des vaticinations-fleuves des soi-disant voyantes que certains présentent comme des porte-parole du Ciel. Une telle attitude de la part de l’ASQC se fonde sur le constat que les soi-disant révélations du XIXème et du XXème siècle n’ont jamais eu pour fruits qu’une rage anti-cléricale, et que la constitution d’un magistère parallèle, dont les organes sont des laïcs auto-proclamés interprètes d’une révélation qui semble avoir sur eux tous les effets d’un leurre diabolique.

 

Les Prêtres de la Concorde augustinienne et sacerdotale ne pratiquent que la spiritualité de nos Pères, qui se tient éloignée aussi bien des révélations privées que de la curiosité des choses « trop élevées » (Ps. CXXX, 1). Sous leur direction, les fidèles suivent la voie sûre de la Parole de Dieu, dont l’homme vit essentiellement (Deut. VIII, 3 ; S. Math. IV, 4), et de la prière, qui doit être perpétuelle (I Thes. V, 17).

 

VII. Nullam partem.

Rejet de l’Eglise néo-catholique.

 

C’est un principe de précaution qui pousse la Concorde augustinienne et sacerdotale à adopter une position précise vis-à-vis de la néo-Eglise romaine qui porte actuellement le nom de catholique. Le terme de néo-Eglise semble convenir, tout comme celui d’Eglise post-moderniste. Historiquement, au XIXème siècle, les partisans d’un ultramontanisme outré n’hésitaient pas à se glorifier du terme – alors injurieux – de « néo-catholiques » par lequel leurs adversaires pensaient les stigmatiser. La refondation de l’Eglise catholique, au XIXème siècle, en vertu de maximes contestables et périlleuses, a donné lieu à la recomposition de la forma mentis du peuple catholique, au point que la religion de nos Pères s’en est trouvée comme anéantie et remplacée par une nouvelle spiritualité, non seulement inouïe des Anciens, mais encore rejetée et condamnée aussitôt qu’entraperçue…

 

La Concorde augustinienne et sacerdotale ne perd pas de vue que l’événement appelé « IIème Concile du Vatican » ne fut jamais que la stabilisation d’un mouvement global de réforme, dont l’une des premières réalisations fut le Concordat de 1801, et précipité par la prise de pouvoir des militants laïcs contre la hiérarchie apostolique. Le pari qui avait été fait de convertir la Modernité, de lui persuader qu’elle n’était que « la fille ingrate du christianisme » (dixit l’Abbé Rohrbacher, Histoire universelle de l’Eglise catholique, Paris, 1850, t. I, p. xxvii), et de profiter du renversement des trônes pour inaugurer une ère de christianisme triomphant, a été perdu. De réforme en réforme, les rituels ont été transformés, au point qu’il ne fait pas de doute que les Ordres conférés par la néo-Eglise sont aussi invalides que ceux des Anglicans.

 

La Concorde augustinienne et sacerdotale n’entend toutefois pas se livrer à l’habituel torrent d’insultes que les milieux traditionalistes ont habitué les oreilles pieuses et chastes à entendre à l’encontre des autorités que peu ou prou tous reconnaissent détenir quelque degré de légitimité. Cela n’est convenant ni pour des Prêtres ni pour des Laïcs.

 

Aussi, en dépit de grands efforts théologiques et intellectuels, la Concorde augustinienne et sacerdotale est-elle incapable de reconnaître dans S. S. François Ier autre chose que le chef d’une néo-Eglise, foncièrement différente de celle de N.-S. Jésus-Christ, qui existe encore – qui existera jusqu’à la fin des siècles – et qui est appelée par le Saint-Esprit « cette Eglise glorieuse, sans tache ni ride, ni rien de semblable, mais sainte et immaculée » (Eph. V, 27).

 

La Concorde augustinienne et sacerdotale ne se réjouit pas des malheurs qui adviennent à la néo-Eglise, à cause de sa dépravation morale, considérant que les avanies humaines sont peu de choses comparées à l’adultération progressive de la doctrine, de la discipline et de la forma mentis catholiques, qui aboutissent pour ainsi dire naturellement à la néo-Eglise.

 

Par conséquent, les Prêtres de la Concorde augustinienne et sacerdotale ne prient-ils pas en union avec S. S. François Ier, selon la parole de S. Cyprien : « Adhérer à un faux Evêque de Rome, c’est être en dehors de la communion de l’Eglise. »

 

Ils ne voient pas en lui un « vrai Pape, quoiqu’hérétique », ni un « Pape vraiment hérétique », ni un « Pape matériel », ni un « antipape », mais un chef aveugle conduisant des aveugles vers la fosse où ils tomberont (S. Lc VI, 39) – s’abstenant soigneusement d’ « injurier les gloires », se contentant de dire avec S. Michaël Archange : Imperat tibi Deus (Jude I, 8-9).

 

Par conséquent, la Concorde augustinienne et sacerdotale prend acte de la vacance de facto et de jure du Siège apostolique de S. Pierre, adhérant à la conclusion théologique généralement désignée sous le néologisme de sédévacantisme. – Cependant, nous devons souligner un point capital. De nos jours, on assiste à l’essor, spécialement sur l’Internet, d’un courant de type religieux qui se désigne lui-même par le titre de « sédévacantisme » (on pourrait plutôt dire nucisme, de « n. u. c. » ou « non una-cum »). Il se caractérise non seulement par l’outrance verbale et le mépris patent pour la hiérarchie catholique, mais encore par sa nature d’entreprise purement laïque. En effet, les laïcs y sont tour à tour politiciens, apologistes, prédicateurs, théologiens, casuistes, évangélisateurs, directeurs d’âmes, employeurs de clercs, voire caballeros mystiques. Sans attendre plus longtemps, la Concorde augustinienne et sacerdotale tient à se distinguer de cette mouvance, et à affirmer que non seulement elle ne cautionne aucun de ses agissements, mais encore qu’elle les récuse dans leur ensemble comme illégitimes, dépourvus de mission, anti-hiérarchiques et contraires à la tradition catholique, tant par les mœurs que par la forma mentis.

 

Les clercs de la Concorde augustinienne et sacerdotale font monter vers la Pierre angulaire posée en Sion (Eph. II, 20) des prières et des supplications pour le retour d’un Pape sur le trône de S. Pierre, confessant qu’il est impossible que l’Eglise puisse subsister normalement sans que le Vicaire du Christ occupe la primauté en son sein, et qu’il « confirme ses frères » (S. Lc XXII, 32), selon l’ordre du Christ dont il est l’image incorruptible sur terre.

 

VIII. L’Eglise est dans l’Evêque

Rejet de la notion d’Evêque diminué.

 

Toutefois, la Concorde augustinienne et sacerdotale ne déconsidère nullement la nature et la fonction de l’épiscopat, contrairement à l’habitude du néo-ultramontanisme du XIXème siècle (qui se distingue en cela quelque peu de la doctrine de S. R. Bellarmin). En effet, après sa confession de la divinité du Fils de Dieu, le Christ dit à S. Pierre : « Tu es heureux, Simon, fils de Jean, car ni la chair ni le sang ne t’ont révélé ceci, mais mon Père qui est dans les cieux. Aussi, moi je te dis que tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise, et les portes de l’enfer ne prévaudront point contre elle. Et je te donnerai les clefs du royaume des cieux, et tout ce que tu lieras sur la terre sera lié aussi dans les cieux ; et tout ce que tu délieras sur la terre sera aussi délié dans les cieux. » (S. Mth. XVI, 17-19)

 

Le nom de Pierre est lié à sa confession, lui qui s’appelait auparavant Simon. Cette confession est, d’une part, d’origine divine (S. Pierre ne dit jamais rien qui ne vienne du Père céleste, donc son discours est exempt d’erreur ; autrement, ce n’est pas le Saint-Esprit qui s’exprime par sa bouche) ; d’autre part, comme elle a pour objet la divino-humanité du Messie, elle constitue la pierre sur laquelle le Christ bâtit son Eglise. C’est pourquoi S. Paul, coéquipier de S. Pierre, écrit : « [Vous êtes] de la maison de Dieu, bâtis sur le fondement des apôtres et des prophètes, le Christ Jésus étant lui-même la pierre principale de l’angle, sur lequel tout l’édifice construit s’élève comme un temple sacré dans le Seigneur » (Eph. II,19-21).

 

Pierre porte le Nom de N.-S. Jésus-Christ – la Pierre –, qui bâtit son Eglise sur Lui-même. C’est là l’interprétation majoritaire des Pères.

 

D’autre part, le Christ, appelant le collège apostolique, n’a pas appelé Pierre, qui ensuite aurait reçu l’ordre d’appeler les autres apôtres. Pourtant, bien des fois, le Christ a fait faire par d’autres des actions qu’il n’a pas voulu faire lui-même, comme lorsqu’ayant ressuscité Lazare, il chargea ses disciples de le délier (S. Jn XI, 44), ou qu’il remit le fils de la veuve à sa mère (S. Lc VII, 15).

 

N.-S. Jésus-Christ a donné les Clefs à Sᵗ Pierre, le constituant prince, arbitre, chef c’est-à-dire garant de l’unité, des Apôtres en tant que collège apostolique (S. Math. XVI, 18) ; et, à un autre moment, il a dit directement à tous les Apôtres : « Comme mon Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie. … Recevez l’Esprit saint ; ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis ; et ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus. » (S. Jn XX, 21-23)

 

Les Evêques, successeurs des Apôtres sont soumis au Pape comme à leur prince ; mais ils font partie, avec lui, quoique de façon différente et subordonnée à lui, de la capitalité de l’Eglise, et non de la corporéité. Ils sont les « frères » de Pierre, non ses fils, du moins comme les laïcs sont les fils du Saint Père. Si le Pape est le garant de l’unité doctrinale, le collège apostolique (qui est lui aussi garant, à son niveau de la doctrine, puisque le Concile, soit l’assemblée des Evêques, ne tient pas sa puissance du Pape mais de N.-S. J.-C. qui l’a institué ; il dépend en revanche de lui (en tant qu’arbitre) pour la ratification de ses décrets ; le collège apostolique – et chaque Evêque en particulier –, donc, est responsable de la perpétuation de l’existence hiérarchique de l’Eglise en tant que corps.

 

L’Evêque est un géniteur : dépositaire de la plénitude du sacerdoce, il a pour mission intrinsèque d’engendrer des Prêtres et des Evêques, qui garantissent la pérennité de l’Eglise. L’administration de l’Eglise est sa raison d’être ; il en est un Prince, et non pas un simple légat du Pape. – Si une crise intervient au niveau de la papauté, en attendant le retour à la normale, il entre dans les devoirs d’état des Evêques de veiller à la continuité de la structure de l’Eglise. Le mandat pontifical pour le sacre des Evêques est un détail administratif, non une condition de la validité du sacre ; en temps de crise, son absence n’empêche aucunement la licéité du sacre, car l’Evêque porte en lui-même la raison suffisante de sa fonction. C’est d’elle que vient la licéité : tout ce qu’il fait est vraiment d’Eglise. Certes, c’est en vertu de l’épikie, ou principe d’application du droit en fonction de la justice (S. Thomas d’Aquin, IIa-IIæ, q. 80, 5), que l’Evêque consécrateur présuppose que le mandat aurait, dans les contions ordinaires, été pourvu par le Saint-Siège. Les Evêques restent soumis au Pape, cela va sans dire ; mais ils possèdent en eux-mêmes leur raison d’être, qu’ils ne tiennent pas du Pape en tant que tel.

 

La grande erreur des néo-ultramontains, Lamennais en tête, est d’avoir prétendu que l’Evêque est au Pape ce que le Prêtre est à l’Evêque : une simple extension. Or, c’est absolument faux, et contraire à l’ecclésiologie traditionnelle, toutes tendances confondues.

 

Les pouvoir sacerdotaux sont les suivants : offrir le saint Sacrifice de la Messe, bénir, présider, prêcher et baptiser. Le pouvoir du Prêtre est une participation à celui de l’Evêque, dont le propre est, quant à lui, de juger, d’interpréter, d’ordonner, d’offrir (le Saint-Sacrifice), de baptiser et de confirmer. La notion d’ « épiscopat diminué » est une invention récente, qui vise à dépouiller les Evêques de leur caractère apostolique. Il ampute l’Evêque de sa raison d’être, en l’inféodant abusivement au pouvoir du Pape. La qualité de Prince des Apôtres de celui-ci ne réduit pas les Evêques à n’être que des fonctionnaires, des administrateurs délégués, sans aucune réalité intrinsèque. Par l’anneau qui lui est remis, l’Evêque épouse l’Eglise, dont les enfants sont les siens. Nos Pères estimaient à leur juste mesure ces paroles de S. Ignace : « Obéissez tous ensembles à l’Evêque, comme Jésus-Christ a obéi à son Père. … Dans tout ce qui regarde l’Eglise, ne faites rien sans l’Evêque. … Où est l’Evêque, que là soit la multitude, comme l’Eglise catholique se trouve où est Jésus-Christ. … Ce qu’il approuve est la seule chose agréable à Dieu, la seule voie sûre et certaine. … Soumis, ainsi que vous l’êtes, à l’Evêque comme à Jésus-Christ lui-même … non seulement ne faites rien sans l’Evêque, mais encore soyez soumis aux Prêtres comme aux Apôtres mêmes de Jésus-Christ. … Vénérez l’Evêque comme l’image de Dieu le Père ; les Prêtres comme le Sénat de Dieu, ne faisant qu’un avec les Apôtres. …. Sans ce parfait accord, il ne faut plus parler d’Eglise. » (Epist. ad Smyrnæos, cap. VIII)

 

Chaque Evêque catholique orthodoxe est donc un Prince de l’Eglise, un successeur des Saints Apôtres, mis à la tête d’une portion des fidèles, avant tout par la grâce de Dieu, et dans un second temps, dans les circonstances ordinaires, par celle du Saint-Siège. S. Grégoire le Grand ne déclarait-il pas : « A Dieu ne plaise que je viole jamais ce que nos Pères ont établi dans chaque Eglise en faveur de mes Confrères dans le sacerdoce. Je me ferais tort à moi-même, si je troublais mes Frères dans la jouissance de leurs droits. » Tout le témoignage de l’Antiquité va dans ce sens ; celui des auteurs modernes, s’il n’est pas toujours convaincu d’innovation, ne saurait invalider dix-huit siècles et demi de tradition. La Concorde augustinienne et sacerdotale garde à l’esprit ces paroles du grand Evêque de Genève : « Il est de la gloire de Dieu même, que l’Ordre épiscopal soit respecté dans les pouvoirs qui dépendent de son institution. »

 

Si les Evêques pouvaient diminuer dans leur Raison pastorale, les fidèles le pourraient aussi dans leur nature de brebis de Dieu. Or, sans surprise, l’essor du militantisme correspond au déclin et à la destruction de la théologie traditionnelle de l’épiscopat. Si le Christ peut cesser d’être le Bon Pasteur, les Evêques, en conséquence, pourraient cesser d’être ses vicaires. Or, les paroles de l’Ecriture sont formelles : « Comme un berger, il fera paître son troupeau ; il recueillera les agneaux dans ses bras, et les portera dans son sein ; il conduira doucement celles qui allaitent. » (Is. XL, 11) Le Christ va « dans le désert, pour aller après celle qui est perdue, jusqu’à ce qu’il l’ait retrouvée. Et quand il l’a retrouvée, il la met sur ses épaules tout joyeux » (Lc XV, 4-5).

 

Le Prêtre ne peut confesser sans être sous l’obédience d’un Evêque, car il ne possède pas la plénitude du sacerdoce : il est lié. L’Evêque, en revanche, n’étant pas une extension du Pape, il peut – en cas de crise – sacrer validement et licitement sans mandat. Il porte en lui-même la raison de sa mission, contrairement au prêtre. Tous les sacrements donnés en obédience à un Evêque catholique sont valides et licites.

 

Ce qui fait que l’on envisagerait une Eglise composée d’Evêques et de laïcs, plutôt que de Prêtres et de laïcs ; le Prêtre n’est pas nécessaire à l’Eglise, contrairement à l’Evêque. A moins de se trouver dans une réelle situation extraordinaire, le Prêtre sans Evêque non seulement ne doit pas confesser, mais encore il devrait s’abstenir de dire la messe !

 

« L’Eglise est dans l’Evêque, comme l’Evêque dans l’Eglise », déclare S. Cyprien. Là où est l’Evêque, là est l’Eglise ; là où est le Prêtre soumis à un Evêque, là est l’Eglise ; là où est un Prêtre rebelle, l’Eglise n’est plus : ses sacrements sont sans fruits, illicites et sacrilèges.

 

« Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde » dit N.-S. (S. Mth 28.20). A moins d’être protestant, il faut comprendre cette présence comme la présence sacramentelle. Or, sans prêtre, pas de S.-Sacrement ; sans Evêque, pas de Prêtre ; mais sans Pape (provisoirement, de toute façon), les Evêques ont le devoir de perpétuer la hiérarchie fonctionnelle de l’Eglise, qui constitue sa visibilité théologique (c’est-à-dire son existence factuelle, réellement structurée). Par conséquent, la parole de N.-S. signifie : quelles que soient les circonstances, il y aura toujours des Evêques, car sans eux, l’Eglise disparaîtrait. Or : « les portes de l’enfer ne prévaudront point contre elle », l’Eglise !

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