Le Seigneur Sabaoth appelle certains chrétiens à vivre dans un état de plus grande perfection. La vie religieuse, à strictement parler, n’est pas le fruit d’une vocation. Elle est ouverte à tous, car la vie chrétienne laïque est déjà une séparation d’avec le monde (S. Jc I, 27), un plein et définitif renoncement au diable, à ses œuvres et à ses pompes (Liturgie du baptême). La vie religieuse est néanmoins la vie évangélique en son plein, cette vie à laquelle tous doivent tendre, même les laïcs selon leur mode propre, objets de la miséricordieuse tolérance divine (I Cor. VII, 9). Les laïcs ont une raison d’être, que nul ne saurait leur contester : elle se réalise par le mariage et la génération. Aussi, l’entrée en Religion n’est pas la consécration d’un célibat causé par l’asociabilité ou la misanthropie : elle est la concrétisation du désir de perfection, de la part d’une âme de forma mentis normale, qui veut aimer Dieu d’une façon sacrificielle, qui répond de façon absolue à la parole du Sauveur : « Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans les cieux ; puis viens, et suis-moi. » (S. Mth. XIX, 21)
Si les préceptes du Sauveur s’imposent à tous, l’observation des conseils relève d’une forme plus élevée d’amour de Dieu. L’entrée en Religion est une mort au monde de la volonté propre et des sens ; aussi ne doit-elle pas s’effectuer à la légère. Elle n’est pas un droit ; les Supérieurs n’ont aucune obligation de recevoir un impétrant qui ne leur paraîtrait pas apte à la vie de charité et de renoncement, mais aussi à la vie communautaire. « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renonce lui-même, qu’il prenne sa croix et me suive » (S. Math. XVI, 24) : on n’entre pas en religion pour briller, mais pour s’éteindre à la vie de la cupidité, en aimant Dieu par-dessus tout, et son prochain comme soi-même.
La Concorde augustinienne et sacerdotale accueille des Religieux, qui seront, par la suite, envoyés dans les Maisons en fonction des besoins. Elle veille à leur donner une formation appropriée, fondée sur la Règle de N. S. P. Augustin, ainsi que sur les prescriptions des Anciens. Après un Postulat (de trois mois) et un Noviciat (d’une année), les Religieux y prononcent les trois vœux de façon simple, pour une durée de trois ans. Plus tard viennent les Vœux solennels.
Les Religieux sont ceux auxquels les paroles de N.-S. Jésus-Christ s’adressent en premier lieu : « Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et ployez sous le fardeau, et je vous soulagerai. » (S. Mth. XI, 28) Les candidats rencontrent les Supérieurs pour des entretiens préalables. Le discernement s’effectue par ces derniers, qui en réfèrent à l’Evêque, dont la décision est irrévocable, alors même que le noviciat serait accompli.
Une fois acceptés, ils s’occupent des tâches qui incombent à leur état, sous la direction des Aînés et des Supérieurs, et la protection de l’Evêque. Ils mènent une vie de prière et de recueillement, rythmée par le chant de l’Office divin. Les Novices reçoivent un enseignement poussé, qui porte tant sur la vie religieuse que sur les fondements de la vision chrétienne du monde. Une attention particulière est donnée aux tâches humbles et aux travaux manuels. Ora et labora est la devise fondamentale des Religieux.
Les Religieux portent un habit distinctif, conforme aux coutumes de la Famille augustinienne.
La spiritualité augustinienne met l’emphase sur la gratitude envers Dieu pour la grâce gratuite qu’il accorde à qui il veut. Cela entraîne une grande paix et une joie profonde, qui rend léger le joug du Bien-Aimé Sauveur (S. Mth. XI, 29). La vie religieuse, difficile de par sa nature, se ressent de cette joie, lorsque l’amour de Dieu est bien sa motivation profonde et sincère. Celui que ne porte pas le joug « doux et léger » du Christ est écrasé par l’intolérable fardeau de l’amour-propre.
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Pour devenir Religieux, il n’est pas besoin, nous l’avons dit, d’une vocation au même titre que celle que reçoit de la part de l’Evêque celui qui est pressenti pour le sacerdoce. Le désir de consacrer sa vie à Dieu d’une manière plus parfaite que ne le font les laïcs doit provenir d’un amour particulièrement vif de Dieu. Il revient aux Supérieurs d’apprécier si le candidat est apte à être reçu parmi les Religieux de la Concorde.
« Il faut que le sujet que l’on reçoit ait le corps sain, et assez robuste pour supporter les austérités de la Règle ; qu’il ne soit point chargé de dettes, ni de parents qui aient besoin de son assistance pour vivre ; qu’il sache quelqu’un des métiers qui s’exercent dans la Maison, ou qu’il ait disposition à l’apprendre ; qu’il n’ait point l’esprit agité de troubles et de perplexités, et qu’il ne soit ni bizarre, ni singulier : qu’il ait un caractère doux, ouvert, sociable ; qu’il ne soit point opiniâtre, turbulent, hautain, léger, inconstant, chagrin, sombre et mélancolique ; qu’il n’ait point mauvaise réputation ; ni aucune tache publique. S’il est tombé dans le dérèglement, ou s’il a vécu dans le parti de l’erreur, qu’il le déteste de tout son cœur, et se soutienne depuis longtemps dans le bien et dans les exercices de la piété avec une telle édification, qu’il n’y ait aucun sujet de douter de la sincérité de sa conversion et que sa vocation soit toute sainte, qu’elle soit ferme, sage et réfléchie ; qu’elle ne soit l’effet d’aucune nécessité temporelle, d’aucune contrainte ni suggestion intéressée ; que le dépit, la légèreté, le caprice, ou quelques considérations humaines n’y aient aucune part ; qu’il ne soit conduit à la Concorde que par le seul désir de son salut. » (Extraits des Constitutions de l’ASQC.)
La Concorde augustinienne et sacerdotale compte trois types de Religieux : les Frères lais (ou convers), les Religieux tonsurés, et les Religieux-Prêtres. Ces trois états sont hiérarchisés les uns relativement aux autres, de sorte que tout candidat commence par être reçu à titre de Frère lai, ce qui constitue une épreuve d’humilité. Si l’état religieux est considéré comme plus parfait, il faut que celui qui y aspire soit, sinon parfait, du moins dans des dispositions intérieures qui le font tendre vers la perfection.
L’état de Frère lai est stable en soi, et n’implique aucun avancement nécessaire. Il est suffisant pour travailler à son salut dans le cadre de la Religion, au moyen de la pratique des trois Vœux, par lesquels l’on fait pénitence pour sa vie passée, et l’on acquiert les vertus nécessaires à sa sanctification.
Si l’Evêque le trouve opportun, et sur la recommandation des Supérieurs, le Frère lai peut accéder à la tonsure, voire aux Ordres mineurs et même majeurs (jusqu’au Diaconat), afin d’être associé plus spécialement à la mission des Prêtres, que ce soit dans la célébration de la Liturgie, dans la mission ou toute autre activité pastorale, où les Prêtres ont besoin de l’assistance d’un clerc. Une telle promotion se fait en fonction des vertus, des aptitudes, de l’ancienneté des Frères lais, et des besoins de la Concorde augustinienne et sacerdotale. En effet, N.-S. J.-C. ne déclare-t-il pas : « Qui est fidèle dans les petites choses est fidèle aussi dans les grandes » (S. Lc. XVI, 10) ?
Enfin, certains Religieux, dans lesquels l’Evêque, de concert avec les Supérieurs, discerne les qualités requises pour le Sacerdoce, accèdent à cet auguste ministère, après une formation adéquate, au sein du Scolasticat de l’ASQC. Leur condition au sein de la Concorde est décrite dans un autre document.